Aujourd’hui, rien ne peut être publié par Wikipédia sans que l’info soit clairement sourcée. En faisant apparaître la genèse des articles, la méthode dessine une fiabilité. À cet égard, l’histoire de l’article Essure – implant de stérilisation très controversé auquel nous avons dédié une enquête -, illustre l’évolution de l’encyclopédie contributive.
Ainsi, l’article Wikipédia « Essure » est ébauché en 2009 par un compte qui ne contribue qu’à ce sujet et n’utilise que les sources de Conceptus (le laboratoire commercialisant l’implant, NDRL) et quelques articles citant les arguments positifs émis par la Haute autorité de santé. Les conditions ne sont alors pas réunies pour créer un article sur Wikipédia : pas de presse, pas d’ouvrage… Mais en 2009, ses utilisateurs sont bien moins regardants sur la qualité des sources.
Un contributeur éphémère rajoute en 2015 la prose rassurante de Pierre Panel. Ce dernier dirige alors l’organisme professionnel des médecins gynécologues et obstétriciens en France (CNGOF) et déclare être consultant pour l’entreprise Conceptus en 2013, année à laquelle l’implant est racheté par la multinationale Bayer. L’ajout est immédiatement supprimé, non pas en raison du conflit d’intérêts, mais parce qu’il ne repose sur aucune source.
Dès 2014, un contributeur averti ajoute dans l’article, mais en texte invisible (il faut ouvrir l’éditeur de code pour le lire), le commentaire suivant : « Affirmation périmée. Essure est une méthode très controversée, notamment aux États-Unis où des actions sont en train de se monter contre le fabricant ».
La première étude critique indépendante sur l’implant, celle de l’université Cornell, ne paraît qu’en 2015 et est ajoutée dans la foulée à l’article dès sa publication dans le magazine Sciences et Avenir. Plus récemment, en 2022, l’article mentionne les associations de patientes et leur combat pour être reconnues comme victimes. L’enquête de Splann ! sur le rapport non publié de l’ANSM, qui mettait en garde contre les risques de corrosion de l’implant, est ajoutée à l’article deux jours après sa publication dans Le Monde.