Splann ! exprime sa pleine solidarité envers sa consœur et signe cette tribune de l’Observatoire français des atteintes à la liberté de la presse (Ofalp), dont plusieurs de ses membres ont participé à la fondation.
La liberté de la presse est un des piliers de notre démocratie. En France, cette liberté fondamentale bénéficie de nombreuses protections. Pourtant, même dans notre pays, elle est menacée. Procédures-bâillons, non-respect du secret des sources, gardes à vue, violences physiques, insultes, harcèlement en ligne, concentration des médias…
De la perquisition et garde à vue subie par Ariane Lavrilleux en septembre 2023 aux obstructions observées par l’ONU sur le chantier de l’A69 ; de la promesse d’une « balle dans la nuque » adressée à des dizaines de journalistes par le site d’extrême-droite « Réseau libre » aux cas de violences policières observés pendant les manifestations contre la réforme des retraites ; des journalistes sont empêchés d’accéder au terrain ou à des documents, sont poursuivis en justice de façon abusive, se voient saisir leur matériel ou, pire, sont perquisitionnés, placés en garde à vue, menacés, voire brutalisés.
Depuis plusieurs années, nous assistons, impuissants, à des faits préoccupants, parfois graves, d’attaques contre la liberté de la presse en France.
Ces pressions sur l’information sont perpétrées par une grande diversité d’acteurs : individus, entreprises, organisations politiques, collectivités locales, représentants de l’État. Nous avons le sentiment diffus d’une prolifération de ces entraves au travail des journalistes et craignons un rétrécissement systémique de la liberté de la presse. Mais nous manquons de données précises et exhaustives pour confirmer, objectiver et caractériser ce phénomène.
Si les cas les plus extrêmes sont le plus souvent médiatisés, ils ne représentent qu’une fraction de la réalité. La plupart des atteintes se font à bas bruit.
Or, chaque fois qu’un journaliste est empêché de faire son travail, c’est potentiellement une information, une révélation, une enquête qui n’arrivera pas jusqu’aux citoyens, sans qu’ils en aient jamais connaissance. Voilà pourquoi défendre la liberté de la presse n’est pas un combat corporatiste, mais doit être l’affaire de tous.
La première étape pour mettre fin à l’impuissance, c’est donc de briser ce silence et de faire connaître, de rendre publiques ces atteintes. Nous, journalistes, associations, médias, organisations syndicales, citoyennes et citoyens, soucieux d’une presse libre, avons décidé de nous doter d’un outil pour recenser, qualifier et vérifier les entraves à la liberté de la presse commises sur le territoire français, pour construire une base de données la plus exhaustive possible.
Ce nouvel outil, c’est l’Observatoire français des atteintes à la liberté de la presse.
L’Ofalp est une association loi 1901, indépendante et non partisane, constituée autour d’un conseil d’administration, de cinq coprésidents et d’une centaine d’adhérents à ce jour. Cet observatoire recensera à la fois les atteintes déjà rendues publiques, mais aussi celles restées dans l’ombre qui lui seront rapportées par son réseau de journalistes et d’organisations (syndicats, associations), ainsi qu’à terme par les victimes d’entraves elles-mêmes, via la création d’une plateforme sécurisée.
Chaque année, à partir du printemps 2025, nous publierons un rapport composé d’infographies et d’analyses écrites, qui sera une photographie de l’état de la liberté de la presse en France via les entraves subies par les journalistes. D’une année sur l’autre, à mesure que notre base de données grandira, nous serons en mesure de dire quels sont les types d’atteintes les plus fréquentes, s’il y a des types de journalistes plus ciblés que d’autres (selon la thématique traitée, leur genre, leur localisation…) ou s’il y a des auteurs d’atteintes plus représentés que d’autres (entreprises, autorités, citoyens…).
Rejoignez-nous pour défendre votre droit de savoir
Ce rapport annuel n’existe pas encore en France, or c’est une arme essentielle qui manque dans le combat pour la défense de la liberté de la presse.
En produisant ces données chiffrées et ces analyses, l’Ofalp jouera un rôle de vigie dans le paysage médiatique français.
Nous, organisations, journalistes et citoyens membres ou soutiens de l’Ofalp, appelons solennellement les citoyennes et les citoyens à s’engager à nos côtés pour défendre leur droit à l’information.
Nous lançons donc un appel à tous les citoyens et aux dizaines de milliers de journalistes qui exercent en France hexagonale et dans les outre-mer, en les invitant à participer au mouvement.
En joignant leurs forces au sein de notre observatoire, journalistes et citoyens pourront renforcer la confiance mutuelle et protéger ce bien commun qu’est la liberté de la presse.
Pour soutenir l’Ofalp, voici trois actions concrètes que vous pouvez engager dès à présent :
- Nous écrire, si vous êtes directement victime d’une atteinte à la liberté de la presse, à contact [@] ofalp.org
- Nous rejoindre, en adhérant à l’Ofalp. Que vous soyez journaliste ou citoyen, vous pourrez alors, si vous le souhaitez, participer aux activités de l’association.
- Nous soutenir, en nous aidant à financer notre premier rapport à paraître au printemps 2025, en faisant un don à soutenir.ofalp.org.
Notre liberté d’informer, c’est votre droit de savoir.
Signataires
- SNJ
- SNJ-CGT
- CFDT-Journalistes
- Un Bout des Médias (UBDM)
- Anticor
- Informer n’est pas un délit (INPD)
- Reporters sans frontières (RSF)
- Article 34
- Sherpa
- Fonds pour une presse libre (FPL)
- Fédération Européenne des Journalistes (FEJ)
- Guilde des auteurs réalisateurs de reportages et de documentaires (GARRD)
- Journalisme & Citoyenneté
- AJIS
- Cabinet d’avocat Vinciane Jacquet
- Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM)
- Disclose
- Mediapart
- Le Poulpe
- Le Crestois
- Basta!
- Rue89 Strasbourg
- Rue89 Bordeaux
- Rue89 Lyon
- Reporterre
- Rembobine
- Alternatives Économiques
- Homo Nuclearus
- Blast
- Les Jours
- Splann !
- Collectif Presse-Papiers
- Collectif Profession Pigiste
- Club de la presse Occitanie
- École des métiers de l’information (EMI)
- Popol Media
- Société des rédacteurs de Marianne
- Société des journalistes d’Arrêt sur images
- Société des journalistes de 60 Millions de consommateurs
- Société des journalistes et du personnel de Libération
- Société des journalistes de Challenges
- Société des rédacteurs du Nouvel Obs
- Société des journalistes de L’Usine Nouvelle
- Société des journalistes de Mediapart
- Société des journalistes de L’Informé
- Société des journalistes de BFMTV
- Société des journalistes de BFM Business
- Société des journalistes de Elle
- Société des journalistes de Télérama
- Société des journalistes de Franceinfo.fr
- Société des journalistes de Franceinfo TV
- Société des journalistes de NRJ Group
- Société des journalistes de Premières Lignes TV
- Société des rédacteurs du Monde
- Société des rédacteurs du Point
- Société des journalistes de Blast
- Société des personnels de L’Humanité
- Société des journalistes de TV5Monde
- Société des journalistes d’Arte
- Société des journalistes d’Epsiloon
- Société des journalistes de RFI
- Société des journalistes du Télégramme
- Société des journalistes de l’AFP
- Société des journalistes de Radio France
- Société des journalistes de Sept à Huit (TF1)
- Société des journalistes de France 3 rédaction nationale
- Société des journalistes de L’Express
- Société civile des journalistes de Sud Ouest
- Société des journalistes de M6
- Société des journalistes de La Tribune
- Société des journalistes du Parisien
- Samsa.fr, organisme de formation
Liste des signataires individuels à consulter sur le site de l’Ofalp
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